Reflet des nombreux atouts de ces investissements, l’allocation sur les stratégies multifactorielles sur les obligations d’entreprise a sensiblement augmenté ces derniers temps
Contrairement à la gestion obligataire traditionnelle, qui consiste essentiellement à gérer de manière active la sensibilité d’un portefeuille aux variations des taux d’intérêt, son risque de crédit et son exposition aux devises, l’investissement multifactoriel sélectionne des titres uniquement en fonction de certaines caractéristiques. Il a été prouvé que ces « facteurs » sont à l’origine des performances des investissements sur la durée.
Plutôt que de prendre des positions en fonction de la trajectoire (attendue) des marchés (« market timing » dans le jargon), les stratégies factorielles ont vocation à générer des performances quelle que soit l’orientation des taux d’intérêt ou des marchés des obligations d’entreprise.
L’idée est donc de sélectionner des obligations capables de surperformer d’autres titres au profil similaire. Face à la volatilité actuelle des marchés, ce biais non-directionnel constitue selon nous une vraie force. Cette caractéristique peut limiter les pertes potentielles lors des phases baissières des marchés, comme celles observées en 2020.
LA SPÉCIFICITÉ DES FACTEURS POUR LA GESTION DES OBLIGATIONS D’ENTREPRISE
L’investissement factoriel sur le segment des obligations d’entreprise n’est pas aussi simple que sur le marché actions, où cette technique est utilisée depuis plus de dix ans. Les facteurs portent le même nom (valeur, momentum, faible volatilité et qualité), mais les investisseurs doivent tenir compte de certaines spécificités de la gestion obligataire :
- Les investisseurs en actions et les investisseurs obligataires n’ont pas les mêmes priorités. Par exemple, en cas de LBO, les actions de l’entreprise peuvent s’inscrire en hausse après l’annonce, alors que l’augmentation de la dette peut pénaliser ses obligations.
- Pour les investisseurs obligataires, la capacité des émetteurs à rembourser leur dette est cruciale, tandis que les investisseurs en actions recherchent des entreprises capables de développer leur activité.
- Le facteur le plus classique pour estimer la valeur d’une action est le ratio cours/valeur comptable. Il permet de déceler des actions sous-évaluées en comparant le cours de bourse et la valeur comptable de l’entreprise. L’idée est d’acheter des titres affichant un ratio cours/valeur comptable faible, afin de bénéficier de leur rebond ultérieur.
- Sur le segment des obligations d’entreprise, ce facteur fonctionne en sens inverse : il sert à éviter les « fausses aubaines », c’est-à-dire les entreprises sous-évaluées qui seront incapables de se redresser.
- La gestion obligataire revêt différents aspects. Une même entreprise peut avoir émis plusieurs obligations avec des échéances et des modalités différentes et, donc, divers profils de risque. Le risque d’une obligation évolue à mesure que le temps passe puisque sa durée de vie résiduelle diminue progressivement. Ainsi, lors de la construction de portefeuille, il convient de prendre en compte plusieurs dimensions de risque : le risque de crédit, le risque de taux d’intérêt et l’écoulement du temps. Plutôt que d’évaluer les obligations de manière globale, mieux vaut adopter une approche plus granulaire, en les comparant à des titres présentant des primes de risque et des échéances similaires.
- Les obligations n’offrent pas le même potentiel de gain que les actions : la rémunération d’une obligation correspond à son rendement (= coupon + variation du prix). C’est pourquoi la protection du capital est essentielle pour les investisseurs obligataires : il est primordial d’éviter les entreprises susceptibles de faire défaut, dont la notation de crédit peut être dégradée, voire qui risquent d’être retirées des grands indices de référence obligataires.
A l’aide des facteurs, nous cherchons à orienter nos positions vers les entreprises les plus rentables, les mieux gérées, dont les titres sont les plus abordables, affichant les niveaux de risque les plus faibles et présentant le momentum le plus solide. Cette approche, intuitive par nature, a démontré sa capacité à enregistrer des performances ajustées du risque plus élevées sur le long terme.
QUELS AVANTAGES POUR LES INVESTISSEURS ?
Les stratégies factorielles appliquées aux obligations d’entreprise renforcent la diversification des portefeuilles.
Puisqu’il est construit de manière à conserver le même niveau de risque que son indice de référence, un portefeuille multifactoriel affiche généralement un profil de risque (non-directionnel) différent. Contrairement aux approches plus classiques, il n’a pas vocation à mettre en œuvre des vues actives en matière de sensibilité, de positionnement sur la courbe des taux ou d’allocation sectorielle.
Ce type de portefeuille est donc plus résistant aux brusques envolées de la volatilité, comme celles observées en 2020. Cela corrobore notre opinion selon laquelle les stratégies multifactorielles devraient être considérés comme des positionnements stratégiques au cœur même des portefeuilles.
Quelle doit être l’allocation d’un investisseur à un tel portefeuille ? Autrement dit, la surperformance des stratégies multifactorielles complète-t-elle bien les autres sources de surperformance ? Puisqu’il n’existe pas de corrélation marquée entre le surcroît de performance des approches multifactorielles et celui des portefeuilles traditionnels, l’intégration de ce type de gestion dans les portefeuilles nous semble judicieuse. Elle peut en effet accroître le degré de diversification et améliorer le profil risque-rendement par rapport à l’indice de référence.
Pour que la diversification porte vraiment ses fruits, nous pensons que l’allocation optimale se situe entre 30 % et 50 %. Naturellement, ce niveau pourra varier en fonction des actifs figurant déjà dans les portefeuilles des investisseurs.
INTÉGRATION DES CRITÈRES EXTRA-FINANCIERS
La gestion des enjeux de durabilité est au cœur de notre approche. Concrètement, nous excluons les émetteurs présentant les notes ESG (environnement, social et gouvernance) les plus mauvaises car elles présentent selon nous des risques plus élevés à long terme, que ce soit sur le plan financier ou en termes d’image.
Au-delà des exclusions ordinaires, nous utilisons des critères non-financiers pour sélectionner les obligations et construire un portefeuille dont la notation ESG globale est supérieure à celle de son indice et dont l’empreinte carbone est inférieure de moitié. Notre évaluation tient compte des émissions directes de CO2 provenant des sources détenues ou contrôlées, ainsi que des émissions indirectes liées à la production des énergies utilisées (électricité, vapeur, chauffage et systèmes de refroidissement). Nous voulons que nos investissements aient un impact durable mesurable.
Grâce à ces engagements en matière de durabilité, nous sommes convaincus que les stratégies multifactorielles appliquées aux obligations d’entreprise complètent parfaitement les stratégies obligataires plus traditionnelles, en leur conférant un rôle d’allocation stratégique et de diversification permettant d’améliorer la performance globale.
- Écoutez également le podcast d’Olivier Laplenie et de Charles Cresteil
- En savoir plus sur l’investissement obligataire
Les opinions exprimées ici sont celles de l’auteur à la date de publication, sont basées sur les informations disponibles et sont susceptibles d’être modifiées sans préavis. Chaque équipe de gestion de portefeuille peut avoir des opinions différentes et prendre des décisions d’investissement différentes pour différents clients. Ce document ne constitue pas un conseil en investissement.
La valeur des investissements et les revenus qu’ils génèrent peuvent aussi bien diminuer qu’augmenter et il est possible que les investisseurs ne récupèrent pas leur mise de fonds initiale. Les performances passées ne sont pas un indicateur fiable des performances futures.
L’investissement dans les marchés émergents, ou dans des secteurs spécialisés ou restreints, est susceptible d’être soumis à une volatilité supérieure à la moyenne en raison d’un degré élevé de concentration, d’une plus grande incertitude parce que moins d’informations sont disponibles, qu’il y a moins de liquidité ou en raison d’une plus grande sensibilité aux changements des conditions du marché (conditions sociales, politiques et économiques).
Certains marchés émergents offrent moins de sécurité que la majorité des marchés internationaux développés. C’est pourquoi les services de transactions de portefeuille, de liquidation et de conservation pour le compte de fonds investis dans les marchés émergents peuvent présenter un risque plus important.
Source : BNP Paribas AM