Pandémie : La vaccination des populations est aujourd’hui, évidemment, la seule porte de sortie de cette crise sanitaire. L’Union Européenne n’a pas pu entreprendre sa campagne à la vitesse désirée par manque de vaccins. Aujourd’hui la possibilité d’accélération est bien là, mais les controverses associées aux vaccins d’Astrazeneca et de Johnson&Johnson pourrait s’avérer un nouvel obstacle pour atteindre aussi vite que possible l’immunité collective si nécessaire pour enrayer la diffusion de la maladie et sauver des vies. Concernant le vaccin de Johnson&Johnson, le comité d’experts qui conseillé les autorités de santé américaines a recommandé de maintenir la « pause » dans les vaccinations avec ce produit. En effet, comme pour l’AstraZeneca, le vaccin américain pourrait être à l’origine de rares cas de trombose. 6 cas, touchant des femmes, ont été identifiés avec une personne décédée. D’où l’appel à la prudence. Néanmoins, malgré cette nécessaire précaution, statistiquement, les deux vaccins semblent générer peu d’effets secondaires tout en assurant une bonne protection contre la maladie. Les semaines qui viennent, vont peut-être tester l’acceptation par la population du risque, même si extrêmement faible, d’être affecté par ces cas très rares de formation de caillots sanguins, potentiellement très dangereux. Une réticence de la population à être vaccinée viendrait ralentir de nouveau le processus vaccinal.
Politique : Hier, J. Powell, dans une interview, a de nouveau répété la stratégie de la Fed dans cette sortie de crise sanitaire, insistant sur la distance encore très longue avant qu’un changement soit opéré sur le positionnement de la politique monétaire. En revanche, il a donné une orientation sur la séquences des mesures qui seraient prises. Ainsi, comme lors du dernier cycle de resserrement graduel, la Fed réduira d’abord son bilan, donc ses achats de titres et ce ne sera que bien plus tard qu’un ajustement des taux d’intérêts sera envisagé. Cette séquence étant déterminée par l’atteinte des objectifs d’inflation et de plein emploi poursuivis par l’institution.
Marchés : Nous voyons bien que les marchés semblent avoir plus de mal à progresser, même si nous restons proches des sommets historiques, que ce soit en Europe comme outre-Atlantique. Les niveaux techniques incitent à la prudence à très court terme, mais les forces haussières restent fortes. Toutefois, la poursuite de l’expansion des multiples, avec des valorisations qui continuent à progresser peuvent venir calmer l’ardeur des investisseurs, d’autant plus si nous avons la mauvaise surprise de voir à nouveau une accélération à la hausse des taux longs. En fait, le paradoxe pour les trimestres à venir est que plus la croissance économique sera forte, plus le risque pour le marché pourrait être élevé.
Si la croissance accélère, comme prévu, à très court terme, puis se modère rapidement, tout en restant relativement élevée, ceci restera porteur pour le marché. Dans le cas contraire, soit par des tensions sur les prix à la consommation à cause d’une demande trop forte, et/ou des anticipations de changement de politique monétaire bien plus rapide qu’anticipé aujourd’hui, pourraient pousser les taux longs vers le haut trop rapidement, affectant négativement le sentiment de marché.
Une hausse des taux longs bien trop rapide viendra détériorer la perception que les investisseurs ont sur les valorisations. Ceci pourrait s’avérer d’autant plus brutal que nous continuons à pousser les valorisations de plus en plus haut. Ainsi, le ratio prix bénéfices pour les S&P, calculé à partir de la moyenne des profits au cours de 10 dernières années comme suggéré par Robert Shiller, a atteint maintenant clairement le plus haut niveau après celui atteint en 2000. D’autres mesures, tout aussi populaires, comme le ratio de la capitalisation boursières sur le PIB, souvent mentionné par Warren Buffet, sont à des niveaux historiquement élevées.
Ces valorisations élevées pourraient persister voire même s’amplifier si les conditions de liquidité restent aussi porteuses qu’elles ne le sont aujourd’hui. En fait, le scénario qui pourrait être le plus porteur serait celui d’une croissance économique plus modérée qu’anticipée, tout en étant forte.
Une raison qui pourrait résulter en une croissance forte mais qui se modérerait rapidement aurait sûrement pour origine un comportement bien plus prudent de dépenses des agents économiques que ce qu’anticipe le marché ainsi que nous-mêmes. En particulier, les taux d’épargne resteraient élevés durablement.
Dans un tel contexte, la manne financière reçue par les ménages, notamment, au travers des transferts publics, resterait immobilisée ou plus probablement pourrait s’orienter vers les marchés financiers. Ainsi, avec une politique monétaire qui resterait très accommodant pour encore un temps long, les marchés seraient encore plus soutenus par cet apport de liquidités, poussant éventuellement les valorisations à des niveaux encore plus élevés.
Le scénario alternatif est celui d’une demande bien plus dynamique, avec, en partie, des taux d’épargne qui se réduiraient plus drastiquement, notamment, en ce qui concerne les ménages, en répondant à une amélioration plus rapide qu’attendu du marché du travail. Ainsi, la stratégie de « surchauffe » qui est préconisée aujourd’hui par les autorités américaines, se traduirait par plus de tensions sur une offre soumise à une demande très forte, ce qui pourrait culminer à des hausses de prix plus importantes qu’envisagées actuellement et sûrement des anticipations qui pourraient pousser les taux d’intérêt de long terme trop rapidement vers le haut.
Il est probable que la réalité se situe entre ces deux alternatives. C’est ce que nous pensons. En ce sens, même si à court terme, après une progression forte, les bourses des grands pays développés doivent souffler, il y a toujours une fenêtre pour porter les marchés plus hauts sur au moins le trimestre à venir.
Si la balance venait à pencher vers plus de tensions dans les trimestres qui viennent, les choses pourraient bien se compliquer.
Source : La Banque Postale Asset Management